Nouvelle base chinoise au Djibouti : état des lieux et perspectives de la stratégie chinoise du collier de perles
Évoquée pour la première fois en 2005 dans un rapport interne du Département de la défense des Etats-Unis, la métaphore du collier de perles conceptualise les desseins d’une Chine en quête d’hégémonie dans l’océan indien. Cette stratégie se traduit par la mise en place de partenariats entre la Chine et des Etats voisins disposant d’emplacements maritimes stratégiques lui permettant de combler ses besoins en approvisionnements énergétiques en provenance du Moyen-Orient.
Le rachat ou la location d’installations portuaires et aériennes, réparties entre les côtes chinoises et les littoraux africains a permis à la Chine d’envisager 14 enclaves dans plusieurs pays (Cambodge, Birmanie, Bangladesh, Sri Lanka, Maldives, Pakistan, Soudan), pour créer, ce que le Président chinois Xi Jinping qualifie de « route maritime de la soie du XXIème siècle ». Dernière pierre à l’ordre du jour, la mise en place d’une base à Djibouti d’ici fin 2017 avec pour objectif affiché la lutte contre le terrorisme et la piraterie dans le Golfe d’Aden. Ce projet fait suite à l’annonce d’une aide de 60 milliards de dollars pour le continent africain début décembre 2015.
Disposant d’une façade maritime de 314 km, le Djibouti dispose d’une situation stratégique de pivot avec le Canal de Suez qui permettra au dragon chinois de satisfaire ses besoins énergétiques démesurés et de concrétiser ses ambitions sur le continent. Plus de 20% des importations chinoises de pétrole proviennent d’Afrique et 50% du Moyen-Orient, et la Chine est le 2ème consommateur de pétrole au monde après les Etats-Unis. Par ailleurs, 15% des investissements chinois sont désormais tournés vers l’Afrique.
La création d’un véritable réseau de facilités navales ne serait cependant pas le seul fruit de la quête d’une réelle suprématie en matière commerciale. Elle participe à une stratégie plus large d’encerclement de son rival dans la région, l’Inde et suscite les inquiétudes des Etats-Unis, qui opèrent depuis quelques années un tournant économique et diplomatique vers l’Asie. Les soupçons d’un détournement de ces installations à des fins militaires en cas de conflit ouvert avec l’un de ses adversaires jettent cependant le voile sur les véritables intentions de la Chine dans l’océan indien.
Par ailleurs, la mise en place d’un nouveau vivier de développement économique chinois en Afrique soulève de nombreuses interrogations, au point que certains parlent de la naissance d’une véritable Chinafrique. Violations du droit du travail, corruption, soutien à des dictatures, sont autant d’accusations qui pèsent sur les investisseurs et politiques chinois. Reste à savoir si la nouvelle base prévue sur le continent permettra à la Chine de redorer son image.